THÉORÈME MILANAIS

160 mc - 2018

Publié dans “T – The New York Times Style Magazine”, mars 2019:

“In a top-to-bottom reimagining of a 1960s-era Milanese apartment, one of Italy’s most innovative architecture firms conjures the spirit of that vaunted age.”

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Dans un immeuble du début des années 1960 au bout de Corso Sempione, une interprétation originale de la maison bourgeoise typique de Milan.

Le projet conserve en réalité la disposition classique d’un couloir central pour distribuer les différentes pièces, ouvrant cependant la zone de vie en la reliant à l’entrée et à la cuisine ; et c’est précisément dans cette partie de la maison que l’inattendu se produit : l’espace est unique, étonnamment étendu vers l’extérieur, mais en même temps clairement divisé de manière perceptible en zones fonctionnelles.
Comme dans la meilleure tradition des grands maîtres milanais du XXe siècle, c’est à un matériau comme le marbre (réalisé par la célèbre entreprise Catella que Gio Ponti cite dans “Amate l’architettura”) qu’est confiée la tâche de guider le projet de l’intérieur vers l’extérieur et d’une zone à l’autre: le sol en Cipollino Tirreno s’étend dans le salon sur les murs pour se “fermer” au plafond, encadrant Milan presque comme un paysage contemplatif, tandis que vers la salle à manger, il laisse place au vert Alpi, à la fois comme “tapis” au sol pour la table et comme support de mobilier ou mobilier lui-même en tant qu’étagère porte-objets. La conception des joints entre les dalles de sol constitue également la base de support du paravent en laiton et verre placé en filtre entre l’entrée, le couloir et la salle à manger, mais aussi élément de rangement qui, à travers ses “bras” métalliques, relie la cuisine et le salon dans une solution de continuité perceptuelle. Le marbre quitte ensuite le couloir pour laisser place à des carreaux de ciment colorés et à un parquet avec des superpositions en résine, les structures métalliques deviennent des portes colorées et le stratifié de la cuisine et de nombreux meubles dans la maison nous ramène aux années de construction du bâtiment en fournissant le contrepoint aux matériaux les plus précieux présents dans la maison.
Un projet de maison qui part du sol, s’articule en hauteur et donne également une voix au plafond où, comme le soutenait le psychanalyste jungien James Hillman, “les dieux n’habitent plus”. La conception de la grande rosace circulaire tente donc, à travers la recherche de Marcante-Testa, de redonner dignité et valeur symbolique à cette partie qui, selon Hillman, est aujourd’hui la partie la plus négligée dans la conception de l’intérieur domestique.
Comme dans de nombreux projets de Magistretti, cet intérieur propose une combinaison de meubles du XXe siècle et contemporains, caractéristique de la représentation qu’une certaine bourgeoisie voulait et veut donner d’elle-même, demandant des espaces de vie capables de concilier les conquêtes de la modernité et la culture de la tradition, ajoutant toujours cette ironie et cette volonté de ne jamais se prendre trop au sérieux présentes dans les projets de Marcante-Testa.

 


Matériaux et mobilier sur mesure :

Structures métalliques et séparations vitrées : conçues par Marcante-Testa, réalisées par Om Project

Meubles et cuisine sur mesure : conçus par Marcante-Testa, réalisés par MATERIADESIGN
Revêtements de sol et murs en marbre : conçus par Marcante-Testa, réalisés par Catella F.lli
Sols en ciment et mosaïques: Bisazza
Peintures murales: Farrow & Ball

 

 

projet par A. Marcante/ A. Testa

collaborateurs: Mattia Inno, Giada Mazzero, Valentina Negro

photographe: Carola Ripamonti